La réinsertion scolaire déjà en panne?
Etait-ce prévisible? Un Etablissement de Réinsertion Scolaire a connu des incidents importants dès le second jour de son ouverture.
L’ouverture annoncée des Etablissements de Réinsertion scolaire recueille peu l’adhésion des professionnels de l’éducation et l’incident d’hier va alimenter le débat: le regroupement des élèves « très perturbateurs » dans ces nouveaux internats scolaires représente la création d’un « milieu à risques », déclarait déjà Philippe Tournier, secrétaire général du SNPDEN-Unsa, citant l’exemple des «colonies d’enfants difficiles», ajoutant que « l’histoire montre qu’il n’y a eu que des échecs en la matière ».
Pourtant le ministre de l’Education croit en l’utilité pédagogique de ces structures:
« Jusqu’à présent il manquait un maillon dans la chaîne de l’Éducation nationale pour répondre au problème des élèves très perturbateurs », disait le ministre en visitant le tout nouvel ERS de l’Académie de Nice, ouvert dès la rentrée de septembre, pour préciser: « Il y avait les classes relais qui permettent aux élèves pendant quelques semaines de réapprendre les fondamentaux […]. Et puis à l’autre bout de la chaîne, pour les élèves qui sont déjà passés par la case justice, il y a des établissements qui sont sous l’autorité judiciaire ».
Les Etablissements de Réinsertion Scolaire ont donc l’ambition de devenir cette pièce supplémentaire au puzzle de la prise en charge de la difficulté comportementale.
Un ERS a ouvert ces portes le lundi 8 novembre, avec 14 élèves encadrés par 8 adultes, à Craon (Mayenne): dès le lendemain, des troubles ont suscité une polémique sur l’efficacité d’un tel dispositif.
Plusieurs versions des faits
Que s’est-il passé? Les versions diffèrent d’un média à l’autre: traitement médiatique de l’immédiateté quand tu nous tiens!
5 des élèves accueillis ont « distribué des coups et des claques sans raison apparente » aux collégiens de l’établissement-support, alors que les uns et les autres n’étaient pas censés se croiser: en effet, les collégiens de l’ERS mangent en « décalé ». En faisant la lecture des événements tels qu’ils sont rapportés par la presse (7sur7, média belge), on comprend que l’incident s’est déroulé à l’issue du petit-déjeûner, l’Inspectrice d’académie expliquant: « Ils avaient pour consigne de retourner, à leur étage, après leur petit-déjeuner. Ils ne l’ont pas fait ».
Le Parisien donne une autre origine à l’incident: « A la suite d’une erreur d’organisation, ils ont croisé d’autres collégiens qui se rendaient à la cantine ».
Combien d’élèves?
La presse ne s’entend pas non plus sur le nombre d’élèves incriminés: 5 ou plus? Le Figaro rapporte: « Une douzaine de collégiens venus de Seine-Saint-Denis auraient « distribué coups et claques sans raison apparente » aux autres collégiens, ont raconté les enseignants. » Il est rejoint par France-Info sur ce point: « la douzaine de collégiens de Seine-Saint-Denis en rupture de ban s’en serait pris aux autres élèves ce matin. » Pour le JDD qui cite le Parisien, c’est bien 5!
20minutes ne s’engage pas et évoque « certains élèves parmi les douze originaires de Seine-Saint-Denis ».
L’Inspecteur d’académie de Seine Saint Denis, d’où proviennent les élèves, a annoncé dans la foulée que 3 volontaires du service civique allaient s’ajouter à l’équipe de départ, portant à 11 le nombre d’adultes pour l’encadrement.
La presse rappelle à l’envi que ces 5 élèves sont originaires de Seine-Saint-Denis et que les parents des élèves ayant reçus des coups ont retiré leurs enfants du collège. D’autres journaux (Ouest-France) évoquent une fronde parentale plus étendue: « Ce mercredi matin plus d’une trentaine de parents d’élèves ont interpellé, devant les grilles du collège Volney de Craon (Sud-Mayenne), l’inspectrice d’académie Solange Deloustal. Ils ont réitéré leur demande de suppression de l’établissement de réinsertion scolaire (ERS) ouvert lundi. Jusqu’à nouvel ordre, ils ont retiré leurs enfants de l’établissement. »
L’ERS n’était pas le bienvenu
En octobre, les professeurs s’étaient mis en grève pour protester contre l’ouverture de cette structure au sein de leur EPLE, estimant que l’encadrement insuffisant. Et depuis, « Les professeurs du collège Volney de Craon ont décidé d’exercer leur droit de retrait ce mardi. Suite à l’altercation dont plusieurs de leurs élèves ont été victimes au sein de l’établissement, ce mardi matin, ils estiment que la sécurité n’est plus assurée. » rapporte Ouest-France.
L’ouverture du premier ERS de France, dans l’académie de Nice n’avait pas été mieux accueillie: la presse rapportait, complaisamment d’ailleurs, l’inquiétude des riverains, celle de la présidente de l’Association des commerçants, ou du médecin assurant le suivi des pensionnaires d’un CAT tout proche, tandis que plusieurs pétitions étaient lancées pour protester contre une implantation décidée de façon «précipitée» et «sans concertation».
Dans la presse des 9 et 10 novembre:
Aller plus loin:
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